Courrier aux ministres sur la biodiversité et l’opportunité d’une « Agence de la nature »

mardi 9 novembre 2010

Jean-Louis Borloo – ministre d’Etat
Chantal Jouanno – secrétaire d’Etat

Objet : Biodiversité et opportunité d’une « Agence de la nature »

Monsieur le ministre d’Etat,
Madame la secrétaire d’Etat chargée de l’écologie,

Les suites éventuelles à donner au rapport d’inspection sur l’opportunité de créer une Agence de la nature doivent faire l’objet d’un débat approfondi. Ce débat s’avère inextricablement lié, qu’on le veuille ou non, à celui des moyens humains et financiers nécessaires consacrés aux différents aspects de la biodiversité, remarquable aussi bien qu’ordinaire, terrestre comme maritime, afin de mettre en application les engagements du Grenelle dans les délais prévus en particulier par la loi.

Les déclarations à ce sujet, toujours orales, livrées par la voix de la secrétaire d’Etat ou du directeur de cabinet du MEEDDM depuis le comité de suivi Grenelle de fin janvier, la réunion du CNDDGE de fin septembre, et celles de la directrice de cabinet du secrétariat d’Etat le 13 octobre dernier, jour où le rapport d’inspection sur « l’évolution des opérateurs publics de la nature » été mis sur le site du MEEDDM, contiennent des contradictions. Fusion ou non, redéploiement et mutualisation par la « holding » ou non, périmètre du « noyau », des premier/second/troisième « cercles », espaces remarquables et/ou biodiversité ordinaire, milieux terrestres ou/et aquatiques et/ou marins… Relations avec les collectivités territoriales… Proposition ou projet de loi, projet de décret… Les orientations des trois responsables sus cités varient et ne sont à l’évidence pas les mêmes.

Jusqu’au rapport conjoint des inspections (IGF et CGEDD), qui n’est plus assumé par l’IGF, par note aux ministres du 25 août avec démenti en retour du CGEDD du 2 septembre ; notes transmises avec le rapport aux syndicats et associations par le cabinet du secrétariat d’Etat. Jusqu’au lien avec la RGPP, contesté « à ce stade » par la secrétaire d’Etat mais plus ou moins assumé par le directeur de cabinet, la première évoquant une proposition de loi ou le cas échéant un projet de loi, le second excluant tout projet de loi.
Et désormais des directeurs d’établissements publics s’adressent aux agents pour leur « faire passer » leur vision. Ainsi le DG de l’ONCFS le 21 octobre dessinant l’évolution de son établissement mais également celle de l’ONEMA, avec démenti en retour diffusé aux services le 25 octobre par le DG de l’ONEMA… Sans parler des « fuites » organisées après contact au cabinet par tel ou tel, président d’association ou de fondation, président de conseil d’administration d’établissement, sur ce que serait le dessein ministériel de la future Agence, souvent d’ailleurs lié au destin personnel du « messager » comme à l’avenir du titulaire ministériel après remaniement…

Cela doit cesser. Les personnels de la DEB, des DREAL, et du réseau des établissements publics visés ne veulent plus subir déstabilisation et manœuvres. Il est plus que temps de répondre à la lettre commune des ONG et des syndicats qui vous a été adressée le 16 mars dernier. Il faut inscrire les thèmes de l’opportunité ou non de création d’une Agence Nature et des moyens pour la biodiversité selon les engagements du grenelle à l’agenda du prochain CNDDGE, d’une part, comme à celui du prochain CTP ministériel, d’autre part, car ces deux niveaux de dialogue sont indispensables et urgents. Il faut y mener un débat approfondi en mettant cartes sur table, avec des projets écrits d’intentions ministérielles, notamment le télescopage des effets possibles de trois mesures RGPP (n° 148, n°154, et Agence nouvelle) sur les établissements visés et du projet de budget 2011.

Dans ce cadre, la CGT tient à vous faire part de ses positions à ce sujet et vous voudrez bien trouver à cette fin le document joint. En bref nous sommes favorables à une instance nationale de pilotage démocratique de la politique de biodiversité selon les cinq collèges du Grenelle, à installer « fin 2010 » selon la loi, et déclinée dans chaque région. Cela simplifierait diverses instances de concertation, historiques ou en projet, et permettrait de gagner en lisibilité comme en légitimité. Le secrétariat de ces instances serait assuré par la DEB au niveau national, et en région par la DREAL. Ces instances ne seraient pas des comités scientifiques (voir note CGT point 6°).

Nous sommes favorables à une meilleure coopération pour l’efficience et le suivi du système d’informations sur la nature et les paysages, comme pour les progrès des connaissances sur la biodiversité, sous l’égide de la DEB et des DREAL entre les composantes du réseau d’établissements et d’organismes concernés. Il faut y consacrer de la volonté, de la méthode et des moyens supplémentaires dans la durée, comme le révèle l’expérience en cette matière (voir point 7°).

S’agissant des personnels titulaires et contractuels, de l’intégrité fonctionnelle des établissements publics, d’un plan pluriannuel de recrutements, la plate-forme revendicative intersyndicale (7 OS) remise le 20 avril 2009 au MEEDDM demeure de pleine actualité (voir points 4°et 5°). La réponse et les engagements du secrétaire général par courrier du 13 mai 2009 doivent enfin se concrétiser. Nous demandons des résultats et un point à ce sujet au prochain CTPM. 

Nous sommes opposés à tout projet visant à amputer tel ou tel établissement public par « redéploiement d’effectifs mutualisés » ou par « mutualisation de moyens budgétaires redéployés » (voir points 1°, 2° et 3°). La RGPP n’a pas sa place ici, alors qu’il s’agit de développer nos moyens pour une pleine efficacité des politiques de protection de la biodiversité dans tous ses volets, conformément aux obligations et objectifs du Grenelle, de la communauté européenne et de la Convention mondiale sur la biodiversité.

Quels que soient nos points d’accords ou de désaccords, nous sommes persuadés que vous comprendrez la nécessité d’ouvrir un débat avec toutes les parties prenantes, comme le besoin urgent de mettre un terme à la spirale déstabilisante pour les personnels, alimentée par les rumeurs, le lobbying, mais aussi par les premiers redéploiements comme les non réponses aux revendications des personnels des établissements visés, des DREAL et de la DEB.

Nous vous prions de croire, Monsieur le ministre d’Etat, Madame la secrétaire d’Etat, à l’assurance de nos sentiments les meilleurs.